Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/05/2008

La vérité cachée sur Notre Dame du Laus

 
 
 
 
1468403196.jpg
 
 
de la prétendue hostilité du « clergé janséniste »
masquant la réelle vénalité des Jésuites
et la honteuse "Embrunade" qui vit l
a destitution de
Mgr Jean de Soanen (1647-1740)



A la mémoire de

« Jean, évêque de Senez, prisonnier de Jésus Christ. » 
 
 
947138485.jpg
Portrait de Benoîte Rencurel 

 




Quoi de plus normal que la reconnaissance du caractère surnaturel des apparitions de la Vierge à la jeune Benoîte Rencurel au Laus, pieuse bergère née en 1647, qui sera l’objet du mois de mai 1664, et jusqu’à sa mort, de révélations, dans des échanges très simples préfigurant la mission qu’elle exercera, sans l’avoir recherchée, durant 54 ans. Ne sachant ni lire ni écrire, les populations, très vite, viendront auprès d’elle pour recevoir avis et conseils. Marie lui confiera d’ailleurs la mission de faire construire une église pour qu’elle devienne un lieu de conversion qui témoignerait de l’exigence de l’Évangile et qui serait porteur de la miséricorde de Marie.

 

 

 

1849995054.jpg
Sainte Catherine de Sienne
 
 
 
En 1666, Benoîte Rencurel s’engage dans le Tiers-Ordre dominicain, “Compagnie des Sœurs de la Pénitence” - portant désormais le capulet blanc, elle vivra une voie exigeante de sanctification personnelle, se livrant à la pratique de sévères pénitences. Le 22 juillet 1678, sainte Catherine de Sienne, de l’Ordre de saint Dominique elle aussi, se montrera à elle pour lui présenter la couronne d’épines du Christ qu’elle acceptera saintement de ses mains. Puis en juillet 1673, Benoîte, au pied de la croix d’Avançon, au cours d’une vision du Christ crucifié, recevra miraculeusement dans son corps les marques et les souffrances de la Passion. Ainsi chaque semaine, pendant neuf années, entrecoupées de deux ans, la douleur de la crucifixion la clouera dans son lit, pendant qu’en extase elle communiera à la passion du Sauveur.
Après des années difficiles, où elle est l’objet d’attaques violentes du démon et de tentations charnelles, de même que de pénibles suspicions de la part du clergé, Benoîte reçoit le saint Viatique le jour de Noël 1718, puis trois jours plus tard, ayant baisé un crucifix, elle lève les yeux au Ciel, et quitte cette terre pour retrouver Jésus en son Royaume [1].




                    Une affirmation non fondée

        

Une absurdité est cependant impérativement à purger dans le ronronnant discours qui se fait autour du Laus aujourd’hui, à savoir l’hostilité du prétendu « clergé janséniste » à l’égard de cette apparition (jansénisme décidément chargé de tous les maux en notre période « d’hédonisme spirituel » [2] et d'hérétique « mystique de la chair »), clergé local, appartenant pour une part à l’Ordre des Jésuites, dont on ne voit pas en quoi il aurait été particulièrement « janséniste », et dont on constate qu’il fut principalement dubitatif, puis positivement réticent pour des raisons bassement vénales que nous allons, non sans étonnement, découvrir et mettre à jour plus loin.


Il importe tout d’abord, dans notre examen, de ne point confondre l’attitude classique de défiance, qui se retrouve régulièrement dans toutes les manifestations mariales - le XIXe siècle est significatif à cet égard (cf. Lourdes, La Salette, etc.) - où le surnaturel s’introduisit brutalement dans la vie de voyants, souvent de jeunes paysans ou bergers illettrés, d’autant que l’Eglise dans ses domaines où se conjuguent rêveries et illusions, s’est toujours montrée d’une extrême prudence face à des quantités de supercheries qu’il importait de déceler rapidement pour ne pas tromper des fidèles aisément fascinés et naïvement attirés par le merveilleux [3].

 


Par exemple en 1986, les experts de la 42e semaine mariale à Saragosse dénombreront dans leurs études très approfondies, au moins 21.000 apparitions mariales depuis l'an 1000, et sur l’ensemble de ces « apparitions », remarqueront que l'Eglise finalement n'en aura authentifié officiellement pas plus d'une quinzaine, ce qui, on l’avouera sans peine, est fort peu. Si l’on veut être plus concret, il faut savoir qu’au cours du seul XXe siècle, c’est pas moins de 400 apparitions mariales (ou prétendues telles), qui ont été recensées, et pas moins de 200 pour la seule période de 1944 à 1993. Or pour 7 d'entre elles seulement sur ces 200, l'Eglise aura reconnu le caractère surnaturel des faits : Fatima (1917 - Portugal), Beauraing (1932 - Belgique), Banneux (1933 - Belgique), Akita (1973 - Japon), Syracuse (1953 - Italie), Betania (1976 - Venezuela), et tout récemment Kibeho (1981 - Rwanda), auxquelles il faut ajouter Zeitoun (1968 - Egypte) et Shoubra (1983 - Egypte), et en revanche 79 d'entre elles reçurent un jugement définitivement négatif [4].

 


Par ailleurs, et pour être complet, n’oublions pas le jugement du pape Benoît XV au sujet des apparitions mariales, dont il convient de se remémorer toujours les termes afin de ne point égarer notre foi :

        « Il faut savoir que l'approbation donnée par l'Eglise à une révélation privée n'est pas autre chose que la permission accordée, après un examen attentif, de faire connaître cette révélation pour l'instruction et le bien des fidèles. A de telles révélations, même approuvées par l'Eglise, on ne doit pas et on ne peut pas accorder un assentiment de foi ; il faut seulement, selon les lois de la prudence, leur donner l'assentiment de la croyance humaine, pour autant que de telles révélations soient probables et croyables pour la piété. [...] En conséquence, on peut ne pas accorder son assentiment à de telles révélations et s'en détourner, pourvu qu'on le fasse avec la modestie convenable, pour de bonnes raisons et sans intention de mépris. »

(Benoît XV, "De servorum Dei beatificatione", livre II, chap.XXXII, n°11.)

 

La position de Pie X va dans le même sens :


         « En cette matière l'Eglise use d'une telle prudence qu'elle ne permet point que l'on relate ces traditions dans des écrits publics, sinon avec de grandes précautions et après insertion de la déclaration imposée par Urbain VIII. Encore ne se porte-t-elle pas garante, même dans ce cas, de la vérité du fait. Simplement elle n'empêche pas de croire des choses auxquelles les motifs de foi humaine ne font pas défaut. »

(Pie X, Encyclique "Pascendi", 8 septembre 1907.)


Ainsi que celle de la Congrégation des Rites :


         « Les apparitions ou révélations ne sont ni approuvées ni condamnées par le Saint Siège, mais seulement permises comme pouvant être crues pieusement et de foi humaine selon les données et la valeur des témoignages. »

(Congrégation des Rites - Réponse à l'Archevêque de Santiago du Chili, 6 février 1875.)


Nous voyons donc que la traditionnelle réserve de l’Eglise n’est pas spécifique au cas particulier de la bienheureuse Benoîte Rencurel, et que les suspicions dont elle subira, certes douloureusement les effets, s’inscrivent d’une certaine manière dans la droite logique prudentielle du Magistère vis-à-vis de ces questions, mais pas seulement, puisque la raison réelle de l’hostilité du clergé local à l’égard du Laus a été largement cachée jusqu’à présent.

 

                    Une idée inexacte : la prétendue hostilité « janséniste »

 

Au fond le plus choquant dans l’ensemble des propos largement, et fort légèrement répandus portant sur les apparitions du Laus, est sans aucun doute cette appellation, confuse et imprécise, reprise par tous les auteurs peu soucieux de véracité historique, de « clergé janséniste » qui aurait été hostile à Benoîte Rencurel, expression utilisée avec une déconcertante facilité et qui demande à être impérativement clarifiée tant elle est propice à des glissements sémantiques tendancieux profondément erronés. 


Mais il ne faut pas oublier que c'est surtout au mouvement instillé par la contre-réforme au concile de Trente (1545-1563), lors duquel on s'était particulièrement penché sur la réaffirmation de la doctrine du péché originel pour contrer les partisans de Luther en insistant sur une pastorale dite de la « repentance » dans laquelle était, de façon novatrice, mise en avant la nécessité d’un ferme regret du péché et un examen intransigeant de ses propres fautes, alors qu’au même moment, poussés par un désir de réforme, les couvents, dans lesquels religieux et religieuses s’adonnaient avec une récente ardeur au port du cilice et s'infligeaient la discipline en retournant aux règles originelles des fondateurs, sans compter que dans les facultés des villes de nombreux étudiants en théologie, laïcs ou jeunes clercs, prenaient au sérieux les aspirations à la sainteté et, sobrement vêtus, menaient au cœur de la société une vie dévote quasi monacale alors que les abbés libertins, poudrés et frisottés, batifolaient et s’ébrouaient hardiment dans les salons du royaume en se moquant visiblement de la religion, que s’installa un climat général de rigueur qui conduira à une religion austère dans laquelle trouve son explication le « rigorisme » qui caractérisera la spiritualité catholique au XVIIe siècle, climat général qui n’a strictement rien à voir avec le courant janséniste et les thèses de Cornelius Jansen portant sur la grâce et le libre-arbitre, mais que l’on se plait faussement à amalgamer pour d'étranges raisons.


Si l’on veut donc parler d’une tendance soi-disant « janséniste », dominante au XVIIe et XVIIIe dans le clergé, telle est la compréhension qu’il nous faut avoir des différents éléments dominants afin de ne point se méprendre sur un terme employé inexactement et avec une facilité singulière qui sert à surtout justifier tous les dévergondages théologiques contemporains.

C’est pourquoi, la dite « hostilité » du jansénisme, entendue comme étant celle d’un courant constitué et organisé, face aux apparitions du Laus, relève de ce fait d’une profonde contrevérité et d'un fantasme pur et simple.  

 

 

         La jalousie vénale des jésuites d’Embrun :

raison réelle de l’hostilité du clergé local à l’égard des apparitions du Laus

 


On doit savoir, ce qui ne manque pas d’étonner, que cette rengaine ridicule et surtout non sérieuse, nous pourrions dire sans outrance : cette plaisante « fable » d’une hostilité janséniste à l’égard de Benoîte Rencurel, est due à plusieurs documents polémiques datant du XIXe et du début du XXe qui confondirent allègrement rigorisme moral provenant du climat religieux de la contre-réforme, prudence ecclésiale et rentes ecclésiastiques, et voulurent principalement dissimuler, ni plus ni moins, la politique commerciale des jésuites de Notre Dame d’Embrun inquiets du délaissement de leur propre sanctuaire au profit du Laus.


Ainsi, cette fable fantaisiste d’une hostilité du clergé janséniste fut reprise sans examen critique par Yves Chiron qui, dans son « Enquête sur les apparitions de la Vierge », intitulera son chapitre sur le Laus : « Le Laus ou le jansénisme vaincu » dans lequel il déclara sans sourciller : « Les apparitions au Laus, dans le diocèse d'Embrun, par leur durée et leur spiritualité, apparaissent comme une réponse au jansénisme. Le diocèse était largement acquis au jansénisme et une partie du clergé va longtemps être hostile aux apparitions au Laus. Le jansénisme rigoriste, hostile à la communion fréquente et aux pèlerinages, se voit opposer, par des apparitions mariales, une religion plus miséricordieuse, où l'Eucharistie est exaltée, où les pécheurs sont appelés à la conversion et au pèlerinage. » ( Enquête sur les apparitions de la Vierge, Perrin, coll. Tempus, 1995, p.149).


Or, contrairement à ce qu’affirme nos modernes fabulateurs, et ce qui est le plus intéressant dans cette histoire, se trouve surtout dans le fait que l'abbé Javelly, docteur en droit canonique et en droit civil, adversaire du pèlerinage du Laus, qui  nomma des prêtres sur le lieu des apparitions qui eurent peu de zèle pour le soin des âmes et fit publier en chaire que « le Laus n'était qu'un abus », n’avait strictement rien d’un « janséniste », mais était plutôt intimement lié aux Jésuites – ce que l’on cache discrètement - sachant que les turbulences importantes dans la vie diocésaine provoquées par le Laus éveillèrent surtout la jalousie des Jésuites du diocèse voisin, qui voyaient la popularité de Notre-Dame d'Embrun, dont ils avaient la charge, ne cesser de diminuer au profit de Notre-Dame du Laus.


On ne dit qu’à voix basse par exemple que la première enquête menée au Laus, dont le résultat fut plus que mitigé et même hostile, menée le 14 septembre 1665 par le grand vicaire d'Embrun, Antoine Lambert, qui dirigeait le diocèse en l'absence de l'archevêque, se fit en présence des membres du clergé d'Embrun, dont André Gérard, jésuite, recteur du collège.

 

               Un mensonge bien utile
 
 
 

On est donc très loin, comme on le voit, de l’influence tant décriée du « jansénisme », mais bien plutôt en présence d'une querelle foncièrement motivée par des questions vénales dont les responsables ne sont pas des membres du clergé hypothétiquement "pénétrés des thèses jansénistes", mais les jésuites désireux de ne point voir s’envoler les bénéfices de leur propre pèlerinage.


Rien que de très classique comme cause réelle que l’on dissimula sous le fallacieux prétexte d’une « hostilité janséniste » purement imaginaire qui arrangeait tout le monde et permettra par la suite de cacher bien des choses.


Il n’en fallait toutefois pas plus pour que les modernes louangeurs d’une spiritualité facile dans laquelle la chair et les émois sensibles occupent une place non négligeable en contradiction avec l'enseignement traditionnel de l'Eglise, distillent dés lors une nouvelle fois, avec un plaisir très palpable et un navrant enthousiasme, un torrent d’absurdités recuites sur les illusoires responsabilités du jansénisme, alors même que ce courant de pensée est parfaitement étranger aux tracasseries qui empoisonnèrent Benoîte Rencurel et le Laus, et que c’est au contraire les Jésuites, dont il n’est plus besoin de rappeler la continuelle haine qu’ils vouèrent traditionnellement aux disciples de saint Augustin, qui, pour préserver leur lucrative rente à Notre Dame d’Embrun, n’hésitèrent pas à lutter vigoureusement contre le développement du Laus et qui portent une très lourde responsabilité dans les vicissitudes infligées à la pauvre Benoîte Rencurel. 

 

             L’indigne destitution de Mgr Jean de Soanem, ou « l’Embrunade » aux durables effets

 

En réalité, la seule trace avérée d’une présence favorable au jansénisme dans le diocèse de Gap, est celle de l’évêque de Senez, Mgr Jean de Soanen (1647-1740), nommé le 8 septembre 1695, qui décrira son diocèse comme un "Un vaste hôpital", et y exerça une vive charité en faisant preuve d'une grande sévérité à l'égard des débauchés, ce qui lui vaudra des inimitiés qui ne tarderont pas à se manifester. Occupant ce siège épiscopal de 1696 à 1727, donc bien après les premières manifestations de la Vierge à Benoîte Rencurel, il prendra des positions favorables aux opposants à la bulle « Unigenitus », contre l’avis de Rome et de l’église de France sous la domination autoritaire et vindicative des autorités civiles qui contraignirent injustement les membres du clergé à se plier à leurs vues médiocrement théologiques.

Cette bulle du pape Clément XI, fulminée le 8 septembre 1713 à l’injuste demande impérative et comminatoire de Louis XIV, condamnait 101 propositions prétendument tirées de l'ouvrage de Pasquier Quesnel, ami et héritier d'Antoine Arnauld, « le Nouveau Testament en français avec des Réflexions morales ». Or on trouvait non seulement dans cet ouvrage des thèmes classiques des auteurs augustiniens, mais des élévations très pieuses qui firent l’admiration du clergé français de l’époque et en particulier de nombreux évêques, dont Mgr Jean de Soanen qui était empli d’un saint respect à l’égard des « Réflexions morales » de Pasquier Quesnel. Maladroitement formulée, la bulle « Unigenitus » ulcéra non seulement une partie du clergé français qui y vit une remise en cause des privilèges de l'Eglise de France, mais également le milieu des théologiens la Sorbonne , ainsi que beaucoup de religieux attachés aux thèses exprimées par Quesnel et qui s’indignèrent légitimement contre la violence d’un procédé inacceptable où le pouvoir politique, outrepassant ses droits, intervenait en des matières touchant à la théologie.  

Pour régler la question de l'opposition de Mgr Jean de Soanen, un concile provincial se réunit à Embrun en 1727 : après un jugement inqualifiable Soanen sera appelé à quitter sa charge et à s’exiler, ce qui laissera de vives traces, plutôt pénibles, dans l’esprit de la plupart des prêtres locaux. Ce concile local, véritable forfaiture à l’injustice violente et scandaleuse, qui réunira les évêques de la province ainsi que celui de Gap, Mgr Berger de Malissoles, explique les traces durables d’une propagande anti-janséniste dans le diocèse de Gap qui perdure jusqu’à aujourd’hui afin de se déculpabiliser d’une décision indigne. Rappelons que le concile provincial s'ouvrit sous la présidence de l'archevêque local Pierre Guérin de Tencin, et le 21 septembre 1727, « L’Embrunade »  selon l’expression de l’évêque de Montpellier, Colbert de Croissy, suspendit Soanen de tout pouvoir et juridiction épiscopale. L’affaire Soanen entraînera à la fin de l’année 1727 la « consultation » de cinquante avocats parisiens favorables au prélat déchu, suivie par la démarche d’une douzaine d’évêques, qui prétextèrent un motif de pure forme pour se solidariser de Soanen. Des estampes à paris et dans les régions représentèrent même Soanen la tête entourée d’un rayon de gloire et ses persécuteurs assis sur les genoux des Jésuites.


Pour mesurer l’ignominie de ce jugement, lorsque les évêques et les autorités asservies au pouvoir royal demandèrent à Mgr Jean de Soanen de bien vouloir oublier le passé il répondit dignement : «Vous m’avez, Messieurs, brisé bras et jambes ; comment pourrais-je vous bénir ? ». Mgr de Soanen entama jusqu’à sa mort, exilé à la Chaise-Dieu, une abondante correspondance qu’il ne signera plus que par « Jean, évêque de Senez, prisonnier de Jésus Christ. »

 

 

                     Conclusion
 
 
 

Ainsi, le rigorisme religieux provenant de la contre-réforme que l'on souhaite oublier au profit du laxisme moral contemporain, la vénalité des Jésuites d’Embrun voyant disparaître les fidèles en direction du Laus, la honte ressentie devant la soumission aux scandaleux impératifs des autorités civiles qui intimèrent l’ordre de chasser Mgr Jean de Soanen qui comparera sa sentence à celle infligée à Hilaire de Poitiers par les conciles hérétiques de Béziers et de Rimini, telles sont les causes réelles de la propagande anti-janséniste qui perdure jusqu’à nos jours, et dont les échos résonnent encore pour couvrir les motifs ignobles et bien peu avouables qui marquèrent l’histoire du Laus, et  que l’on cherche à dissimuler derrière le discours officiel qui entoure la célébration des apparitions de Benoîte Rencurel.    

 

 

Notes



1. Vie de Benoîte Rencurel 

2. « Opposez-vous, autant qu’il vous est possible, à l’assaut de cet hédonisme raffiné, vide de valeurs spirituelles.... » (Pie XII, AAA, XLI, n. 13, 21 nov. 1949).

3. Le jansénisme est loin d'être impliqué dans ces questions, car la prudence proverbiale de la curie est surtout le fait du magistère romain. A Rome, en 1672, le cardinal Giovanni Bona publie par exemple un traité intitulé Du discernement des esprits qui met l'accent sur le risque d'erreur inhérent à toute vision, et met en cause, implicitement, la vertu d'humilité des voyants. Comme le dira excellemment saint Philippe de Nery, « il est difficile de n'être point enflé par les visions. Il est encore plus difficile de ne s'en point croire digne quand on les reçoit : et il est très difficile de témoigner que l'on s'en estime indigne, et de préférer la patience, l'abjection, et l'obéissance à la douceur et à la satisfaction de la curiosité qui se rencontre dans ces visions ». Voir les explications éclairantes sur ce point de Marie-Hélène Froeschlé-Chopard :  « L'image du saint à travers les manuscrits de Notre-Dame du Laus » 
A lire également pour mieux comprendre l’attitude de l’Eglise face aux apparitions, analysant la métamorphose de la piété baroque en Provence en quatre lieux pèlerins : la Marie-Madeleine à Notre-Dame de Baume ; Notre-Dame de Moustiers ; Notre-Dame de Laghet ; Notre-Dame du Laus,  : Elena Zapponi, « Itinéraires pèlerins de l'ancienne Provence », Archives de sciences sociales des religions, 130 (2005), [En ligne], mis en ligne le 2 décembre 2005. 


4. Listes des Fausses apparitions condamnées par l’Eglise et les Evêques :


- 1600~ Maddalena de la cruz, Córdoba, Espagne
- 1769-1821 Marie Lenormand, France
- 1871-1916 Rasputin, Sibérie
- 1861-1922 Felicie Kozlowska, soeur franciscaine excommuniée par Pie X
- 1878 Luigia Piccareta, Corato (Italie) Condamnation Decr. S. Off. 13 juillet 1938 (Index Librorum Prohibitorum)
- 1931 Ezquioga, Espagne
- 1931 Izurdiaga, Espagne
- 1933 Onkerzele, Belgique
- 1933 Etikhove, Belgique
- 1933 Herzele, Belgique
- 1933 Olsene, Belgique
- 1933 Berchem-Anvers, Belgique
- 1933 Tubize, Belgique
- 1933 Verviers, Belgique
- 1933 Wilrijk, Belgique
- 1936 Bouxiers-aux-Dames, France
- 1936 Ham-sur-Sambre, Belgique
- 1937 Voltago, Italie
- 1938 Kerizinen, France
- 1943 Girkalnis, Lituanie
- 1943 Athis-Mons, France
- 1944 Ghiaie di Bonate, Italie
- 1946 Espis, France
- 1947 Pierina Gilli, Montichiari (Italie)
- 1947 Casanova Stafora (jeune femme), Italie
- 1947 Rose Mystique, Italie, condamnée par l'Evêque Bruno Foresti de Brescia
- 1947 Forsweiler, Allemagne
- 1948 Gimigliano, Italie
- 1948 Marina di Pisa, Italie
- 1948 Lipa, Philippines
- 1948 Montlucon, France
- 1948 Cluj, Roumanie
- 1949 Lublin, Pologne
- 1949 Zo-Se, Chine
- 1949 Heroldsbach, Allemagne
- 1950 Acquaviva Platani, Italie
- 1951 Casalicontrada, Italie
- 1953 Cossirano, Italie
- 1953 Santo Saba, Italie
- 1953 Maria Valtorta, Caserta (Italie), condamnée par le Saint Siège 1949, 1959, 1985 et 1993 (16.12.59 Pape Jean XXIII confirme "libri proibiti") - 6.1.1960 Osservatore Romano
- 1954 Eisenberg , Autriche
- 1954 Marie-Paule Guigère, Québec. Crée en 1971 l'Armée de Marie. Condamnée en 1987 par le Cardinal Louis-Albert Vachon, Archévêque du Québec. Confirmation de la condamnation par le Cardinal Ratzinger en février de 1987. Août 2001: les Évêques canadiens déclarent que l'Armée de Marie n'est pas catholique.
- 1956 Urbania , Italie
- 1961 Garabandal, Espagne, condamnée définitivement par l'Evêque de Santander Jose Vilaplana 21.10.96, link
- 1961 Craveggia, Italie
- 1961 Rosa Quattrini, San Damiano (Italie) condamnée le 01.05.1980 par l'Evêque Enrico Manfredi de Piacenza
- 1962 Ladeira, Portugal
- 1964 San Vittorino, Italie
- 1966 Ventebbio, Italie
- 1967 Bohan, Belgique
- 1968 Palmar de Troya, Espagne
- 1968 Carmela Carabelli, Italie
- 1970 Veronica Lueken, Bayside (USA), condamnée par l'Evêque de Brooklyn John Mugavero 4.11.86
- 1971 Marisa Rossi, Rome (Italie), Suivie par le Père Claudio Gatti suspendu "latae sententiae" le 22.10.1998 par le Cardinal Camillo Ruini.
- 1972 Don Stefano Gobbi, Italie, condamn?par l'Archevêque Agostino Cacciavillan (USA) 12.1.95
- 1973 Mortzel, Belgique
- 1973 Dozulé (Magdalene Aumont) France, condamnée par les Evêques de Bayeux & Lisieux Jean Badré 24.6.83 et Pierre Pican 15.3.91
- 1974 Derval, France
- 1976 Cerdanyola, Espagne
- 1977 Le Fréchou, France
- 1980 Ampero Cuevas, El Escorial, Espagne
- 1980 Ede Oballa, Nigeria
- 1981 Medjugorje, Bosnie-Herzégovine, condamnée par les Evêques Pavao Zanic (1985) et Ratko Peric (1993, 1997)
- 1981 La Taludière, France
- 1982 Nowra, Australie
- 1982 Canton, USA
- 1983 Penablanca, Chili
- 1983 Olawa, Pologne
- 1984 Gargallo di Carpi (Gian Carlo Varini), condamnée par Mons. Maggiolini et Mons. Bassano Staffieri
- 1985 Renato Baron, San Martino di Schio, Italie
- 1985 Oliveto Citra, Salerno, Italie
- 1985 Maureen Sweeney, Cleveland (USA)
- 1985 Julia Kim, Naju, Corée, condamnée le 1.1.98
- 1985 Vassula Ryden, Suisse, "révélations non divines" Congrégation pour la Doctrine de la Foi 6.10.95 - Pour plus d'information cliquer ici www.infovassula.ch
- 1986 Nsimalen, Caméroun
- 1987 Mayfield, Irlande
- 1987 Terra Blanca, Mexique
- 1988 Christina Gallagher, Irlande, "aucune intervention surnaturelle" Archevêque Michael Neary
- 1988 Lubbock, USA
- 1988 Scottsdale, USA
- 1988 Estella Ruiz, Phoenix (USA)
- 1989 Joseph Januszkiewicz, Marlboro, New Jersey
- 1990 Teresa Lopez et Veronica Garcia, Denver (USA), interdiction de promouvoir Archevêque J. Francis Stafford 9.3.94
- 1992 Carol Ameche, Scottsdale, Arizona (USA)
- 1992 Debora Moscugiari, Manduria (Taranto) Condamnée le 14.12.97 par Mgr. Franco, Evêque d'Oria et ordinaire du lieu. Lettre Pastorale lue dans toutes les églises du diocèse. Faits qualifiés comme oeuvre du Malin (voir page 521 du livre de Joachim Bouflet "Faussaires de Dieu").
- 1993 Matthew Kelly, New S. Wales, Australie

 

 

 

28/04/2008

Sur la Conversion du pécheur

 

1937581714.jpg
 
Julius SCHNORR von CAROSFELD 

"La conversion de la pécheresse"

Blaise Pascal

 

La première chose que Dieu inspire à l'âme qu'il daigne toucher véritablement, est une connaissance et une vue toute extraordinaire par laquelle l'âme considère les choses et elle-même d'une façon toute nouvelle.

Cette nouvelle lumière lui donne de la crainte, et lui apporte un trouble qui traverse le repos qu'elle trouvait dans les choses qui faisaient ses délices.

Elle ne peut plus goûter avec tranquillité les choses qui la charmaient. Un scrupule continuel la combat dans cette jouissance, et cette vue intérieure ne lui fait plus trouver cette douceur accoutumée parmi les choses où elle s'abandonnait avec une pleine effusion de son coeur.

Mais elle trouve encore plus d'amertume dans les exercices de piété que dans les vanités du monde. D'une part, la présence des objets visibles la touche plus que l'espérance des invisibles, et de l'autre la solidité des invisibles la touche plus que la vanité des visibles. Et ainsi la présence des uns et la solidité des autres disputent son affection; et la vanité des uns et l'absence des autres excitent son aversion; de sorte qu'il naît dans elle un désordre et une confusion [deux lignes en blanc].

Elle considère les choses périssables comme périssantes et même déjà péries; et dans la vue certaine de l'anéantissement de tout ce qu'elle aime, elle s'effraye dans cette considération, en voyant que chaque instant lui arrache la jouissance de son bien, et que ce qui lui est le plus cher s'écoule à tout moment, et qu'enfin un jour certain viendra auquel elle se trouvera dénuée de toutes les choses auxquelles elle avait mis son espérance. De sorte qu'elle comprend parfaitement que son coeur ne s'étant attaché qu'à des choses fragiles et vaines, son âme se doit trouver seule et abandonnée au sortir de cette vie, puisqu'elle n'a pas eu soin de se joindre à un bien véritable et subsistant par lui-même, qui pût la soutenir et durant et après cette vie.

De là vient qu'elle commence à considérer comme un néant tout ce qui doit retourner dans le néant, le ciel, la terre, son esprit, son corps, ses parents, ses amis, ses ennemis, les biens, la pauvreté, la disgrâce, la prospérité, l'honneur, l'ignominie, l'estime, le mépris, l'autorité, l'indigence, la santé, la maladie et la vie même; enfin tout ce qui doit moins durer que son âme est incapable de satisfaire le dessein de cette âme qui recherche sérieusement à l'établir dans une félicité aussi durable qu'elle- même.

Elle commence à s'étonner de l'aveuglement où elle a vécu; et quand elle considère d'une part le long temps qu'elle a vécu sans faire ces réflexions et le grand nombre de personnes qui vivent de la sorte, et de l'autre combien il est constant que l'âme, étant immortelle comme elle est, ne peut trouver sa félicité parmi des choses périssables, et qui lui seront ôtées au moins à la mort, elle entre dans une sainte confusion et dans un étonnement qui lui porte un trouble bien salutaire.

Car elle considère que quelque grand que soit le nombre de ceux qui vieillissent dans les maximes du monde, et quelque autorité que puisse avoir cette multitude d'exemples de ceux qui posent leur félicité au monde, il est constant néanmoins que quand les choses du monde auraient quelque plaisir solide, ce qui est reconnu pour faux par un nombre infini d'expériences si funestes et si continuelles, il est inévitable que la perte de ces choses, ou que la mort enfin nous en prive, de sorte que l'âme s'étant amassé des trésors de biens temporels de quelque nature qu'ils soient, soit or, soit science, soit réputation, c'est une nécessité indispensable qu'elle se trouve dénuée de tous ces objets de sa félicité; et qu'ainsi, s'ils ont eu de quoi la satisfaire, ils n'auront pas de quoi la satisfaire toujours; et que si c'est se procurer un bonheur véritable, ce n'est pas se proposer un bonheur bien durable, puisqu'il doit être borné avec le cours de cette vie.

De sorte que par une sainte humilité, que Dieu relève au-dessus de la superbe, elle commence à s'élever au-dessus du commun des hommes; elle condamne leur conduite, elle déteste leurs maximes, elle pleure leur aveuglement, elle se porte à la recherche du véritable bien: elle comprend qu'il faut qu'il ait ces deux qualités, l'une qu'il dure autant qu'elle, et qu'il ne puisse lui être ôté que de son consentement, et l'autre qu'il n'y ait rien de plus aimable.

Elle voit que dans l'amour qu'elle a eu pour le monde elle trouvait en lui cette seconde qualité dans son aveuglement, car elle ne reconnaissait rien de plus aimable; mais comme elle n'y voit pas la première, elle connaît que ce n'est pas le souverain bien. Elle le cherche donc ailleurs, et connaissant par une lumière toute pure qu'il n'est point dans les choses qui sont en elle, ni hors d'elle, ni devant elle (rien donc en elle, rien à ses côtés), elle commence de le chercher au-dessus d'elle.

Cette élévation est si éminente et si transcendante, qu'elle ne s'arrête pas au ciel (il n'a pas de quoi la satisfaire) ni au-dessus du ciel, ni aux anges, ni aux êtres les plus parfaits. Elle traverse toutes les créatures, et ne peut arrêter son coeur qu'elle ne se soit rendue jusqu'au trône de Dieu, dans lequel elle commence à trouver son repos et ce bien qui est tel qu'il n'y a rien de plus aimable, et qu'il ne peut lui être ôté que par son propre consentement.

Car encore qu'elle ne sente pas ces charmes dont Dieu récompense l'habitude dans la piété, elle comprend néanmoins que les créatures ne peuvent être plus aimables que le Créateur, et sa raison aidée de la lumière de la grâce lui fait connaître qu'il n'y a rien de plus aimable que Dieu et qu'il ne peut être ôté qu'à ceux qui le rejettent, puisque c'est le posséder que de le désirer, et que le refuser c'est le perdre.

Ainsi elle se réjouit d'avoir trouvé un bien qui ne peut lui être ravi tant qu'elle le désirera, et qui n'a rien au-dessus de soi. Et dans ces réflexions nouvelles elle entre dans la vue des grandeurs de son Créateur, et dans des humiliations et des adorations profondes. Elle s'anéantit en conséquence et ne pouvant former d'elle-même une idée assez basse, ni en concevoir une assez relevée de ce bien souverain, elle fait de nouveaux efforts pour se rabaisser jusqu'aux derniers abîmes du néant, en considérant Dieu dans des immensités qu'elle multiplie sans cesse; enfin dans cette conception, qui épuise ses forces, elle l'adore en silence, elle se considère comme sa vile et inutile créature, et par ses respects réitérés l'adore et le bénit, et voudrait à jamais le bénir et l'adorer. Ensuite elle reconnaît la grâce qu'il lui a faite de manifester son infinie majesté à un si chétif vermisseau; et après une ferme résolution d'en être éternellement reconnaissante, elle entre en confusion d'avoir préféré tant de vanités à ce divin maître, et dans un esprit de componction et de pénitence, elle a recours à sa pitié, pour arrêter sa colère dont l'effet lui paraît épouvantable. Dans la vue de ces immensités....

Elle fait d'ardentes prières à Dieu pour obtenir de sa miséricorde que comme il lui a plu de se découvrir à elle, il lui plaise la conduire et lui faire connaître les moyens d'y arriver. Car comme c'est à Dieu qu'elle aspire, elle aspire encore à n'y arriver que par des moyens qui viennent de Dieu même, parce qu'elle veut qu'il soit lui-même son chemin, son objet et sa dernière fin. Ensuite de ces prières, elle commence d'agir, et cherche.

Elle commence à connaître Dieu, et désire d'y arriver; mais comme elle ignore les moyens d'y parvenir, si son désir est sincère et véritable, elle fait la même chose qu'une personne qui désirant arriver en quelque lieu, ayant perdu le chemin, et connaissant son égarement, aurait recours à ceux qui sauraient parfaitement ce chemin.

Elle se résout de conformer à ses volontés le reste de sa vie; mais comme sa faiblesse naturelle, avec l'habitude qu'elle a aux péchés où elle a vécu, l'ont réduite dans l'impuissance d'arriver à cette félicité, elle implore de sa miséricorde les moyens d'arriver à lui, de s'attacher à lui, d'y adhérer éternellement.

Ainsi elle reconnaît qu'elle doit adorer Dieu comme créature, lui rendre grâce comme redevable, lui satisfaire comme coupable, le prier comme indigente.